Pas facile de se démarquer dans la cour des jeux de cartes compétitifs. Entre Magic et Hearthstone les places sont chères, impossible de prétendre accéder au podium sans de sérieux atouts. Pourtant un challenger est prêt à relever le défi. Issu du studio Rhino Games, composé de vétérans de l’industrie vidéoludique, Mythgard compte bien sur son univers bigarré et ses mécaniques aux petits oignons pour nous séduire.
Paru officiellement en 2020, après plus d’ 1 an d’accès anticipé, Mythgard disposait déjà à sa sortie d’un solide gameplay, qui s’est étoffé grâce à deux extensions (Rings of Immortality et The Winter War), apportant encore quelques subtilités et ajustements à l’ensemble. Le mode Histoire constitue le point de départ idéal pour appréhender les mécaniques de jeu, tout en découvrant cet univers déjanté aux multiples influences. En effet le jeu propose 6 factions, chacune correspondant à une couleur et une mythologie particulière.
Ainsi Oberos, en rouge, s’inspire de la mythologie gréco-romaine pour nous proposer des démons, des vampires, mais aussi un étrange cirque itinérant adepte de magie infernale. C’est la couleur par excellence si vous souhaitez utiliser des dégâts directs et des drains de vie. Plusieurs de leurs créatures peuvent également se métamorphoser au cours de la partie pour gagner de nouvelles capacités.
Le Norden, en bleu, puise dans le folklore scandinave, regroupant des dryades, des trolls, des berserkers, ainsi qu’un gang de motardes valkyries. Cette faction a la peau dure grâce à ses sorts de boost et de soin, couplés à des créatures déjà bien solides à la base. Si vous aimez les gros monstres qui tapent fort inutile de chercher plus loin !
Influencé par la mythologie aztèque, l’Aztlan, en jaune, abrite une corporation étudiant de mystérieux artefacts et jouant aux apprentis sorciers grâce à divers mutagènes. Cette faction se sert du “flétrissement”, une affliction qui diminue les stats d’une créature à chaque tour, pour affaiblir l’ennemi et n’en faire qu’une bouchée.
Vous trouverez en orange l’Empire de Parsa, une théocratie dirigée par une impératrice immortelle et son armée d’anges. Cette faction pioche majoritairement dans les traditions perses, juives et chrétiennes, tout en y ajoutant une teinte futuriste, avec notamment du transhumanisme et tout un tas de robots. Ici vous pourrez compter sur vos nombreux enchantements désertiques pour prendre l’avantage.
En Vert, la faction Dreni unit sorcières et loups-garous sous la bannière d’un régime totalitaire appelé Ved’ma. Inspirée des mythologies slaves, cette faction s’appuie sur ses sorts et sur l’effet de groupe pour écraser ses adversaires. Elle peut aussi renforcer ses rangs avec des nécromanciens et leurs acolytes morts-vivants pour s’assurer d’avoir une armée quasiment inépuisable.
Enfin l’Harmony, en violet, se base sur le folklore asiatique, associé à des éléments de pop culture, pour proposer un mélange étonnant. Les puissants courants magiques qui se déchainent en Harmony ont fini par créer une brèche dans la réalité, par où se sont infiltrés deux autres plans d’existence. Ainsi la réalité fusionna avec le Royaume des Esprits et les Terres d’Arcadion, un MMO ultra populaire, pour donner naissance à une faction où cohabitent shinobis, fantômes et créatures numériques.
Un gameplay bien huilé
En traversant le mode Histoire vous aurez l'occasion de vous familiariser avec cet univers extrêmement riche, qui hélas n’est pas assez mis en avant. En effet, l'aventure ne se résume pour l’instant qu’à un seul chapitre regroupant une quinzaine de missions. C’est bien trop léger pour embrasser toute l’étendue du folklore présent, mais bien suffisant pour comprendre les mécaniques de jeu. Vous pourrez mixer les couleurs comme bon vous semble pour créer le deck parfait, en piochant dans 4 types de carte différents (créature, sort, enchantement et artefact), puis en choisissant une Voie et un Pouvoir. Les Pouvoirs, comme les capacités des Héros dans Hearthstone, accordent une compétence spéciale, activable avec votre mana. Vous pourrez par exemple booster une créature temporairement en lui donnant plus de force ou d’armure, ou encore lui accorder un déplacement gratuit, voire faire directement des dégâts à votre adversaire, ou à l’inverse vous soigner. Les Voies de leur côté donnent un petit bonus passif à votre deck : récupérer régulièrement des cartes de votre cimetière, piocher sous certaines conditions, améliorer la durabilité de vos artefacts, etc. À l’heure actuelle Mythgard propose 8 Voies et 8 Pouvoirs afin de convenir à tous les styles de jeu. L'aspect Deck building est grisant et fonctionne très bien, offrant de très nombreuses possibilités et beaucoup de liberté. En plus de mixer les couleurs vous pourrez miser sur les synergies des différents types de cartes. En effet, chaque carte appartient à une catégorie (Rebelle, Canin, Serpent, Esprit, Elf, Elémentaire, etc.) et certaines proposent des combos qui valent le détour.
Concernant les mécaniques de gameplay, sachez que le jeu vous demandera de construire votre réserve de mana en “brûlant” vos cartes. À chaque tour vous pourrez vous défausser d’une carte de votre main pour gagner 1 mana et une gemme de la couleur correspondante. La carte ainsi “brûlée” sera renvoyée dans votre deck, mais vous ne pourrez pas la “brûler” une seconde fois. Le terrain de jeu est séparé en deux lignes, une pour chaque joueur, elles-mêmes divisées en 7 emplacements, où vous poserez vos créatures et vos enchantements. Chaque créature protège les 3 emplacements qui lui font face, mais bien sûr il existe des moyens de passer outre ces défenses pour attaquer directement l’adversaire. Petite parenthèse concernant les enchantements qui permettent de donner une propriété particulière à un emplacement. Cela peut aller d’un bonus de stats pour vos créatures, à la capacité de piocher une carte supplémentaire, en passant par de la régénération, une protection contre les dégâts directs, ou encore l’affaiblissement des ennemis. Les propriétés peuvent être plus subtils, comme le "Long Hiver”, qui gèle pendant un tour toutes les créatures jouées, ou le "Nid de Serpents”, qui s’il est vide au début de votre tour crée automatiquement un petit serpent 1/1. Dans le même esprit, les artefacts vous accorderont toutes sortes de bonus ou de capacités spéciales (piocher une carte si vous jouez deux créatures durant le même tour, accorder +1/+1 à une créature, faire 1 points de dégâts à l’adversaire à chaque fois qu’il pioche, etc.). Ces artefacts disposent de points de vie propres, qui diminueront en même temps que vous prendrez des dégâts. Il sera donc important d’assurer une solide ligne de défense pour éviter qu’ils ne cassent.
Un Free to Play généreux
Au niveau des modes de jeu, là aussi il y a de quoi faire, avec du 2v2 et 1v1, en classé ou contre l’ia, des tournois, un mode Arène, des événements, mais aussi un mode Puzzle, dans lequel vous devrez trouver la bonne combinaison de cartes pour vous sortir de situations bien épineuses. Les premières heures de jeu passent à toute vitesse, nous plongeant au cœur de mécaniques assez simples à comprendre, mais qui se révèlent plus subtils qu’il n’y parait de prime abord. Au fil des parties c’est un vrai régal d’apprendre à maîtriser ces subtilités ! Si Mythgard ne réinvente pas la roue il offre un savoureux cocktail, piochant des idées à droite à gauche pour mélanger tout ça à sa sauce.
Globalement la réalisation est très réussie. Visuellement le titre s’en sort très bien grâce à de talentueux illustrateurs. Avec leurs styles hétérogènes ils contribuent chacun à leurs manières à donner à l’ensemble un cachet unique. Le jeu est bourré de clins d’oeil disséminés à droite à gauche, allant de Gundam à Mario Kart, ou Dune, en passant par les Tortues Ninjas, Star Wars, Pokemon, ou encore Cthulhu et le Necronomicon. Côté bande-son, c’est efficace, aussi bien au niveau des musiques que des différents bruitages. Seul reproche, certaines voix ne collent pas du tout à la carte qu’elles sont censées incarner. Heureusement le studio continue de travailler sur cet aspects pour l’améliorer.
Quant à l’aspect Free To Play, il est suffisamment généreux pour ne pas nous obliger à faire chauffer la carte bleue pour nous amuser. En démarrant le jeu vous aurez une dizaine de missions dédiées à chaque faction, en plus des missions quotidiennes, pour réunir une coquette somme virtuelle. Largement de quoi construire plusieurs decks qui tiennent la route et être compétitif. Bien sûr terminer toutes ces missions vous prendra un certain temps et si vous êtes pressés vous pourrez toujours acheter directement des paquets de cartes. Vous pourrez également recycler vos cartes en trop pour obtenir de l’Essence, qui vous servira à fabriquer n’importe quelle carte, même les précieuses cartes Mythiques.
De plus, les développeurs ont eu la bonne idée d’ajouter un système de decks bonus. Ainsi vous aurez à votre disposition 2 decks proposés par la communauté, qui sont actualisés tous les 3 jours afin de varier les approches. Jouables dans n’importe quel mode, ces decks sont très bien construits et permettent de découvrir le jeu sous différents angles pour trouver le style qui nous convient le mieux. Idéal pour se faire la main avant de construire son propre deck. Enfin, que les anglophobes se rassurent, le jeu est entièrement localisé en français.
L’ambiance du titre de Rhino Games fonctionne du tonnerre ! Les illustrations des cartes sont très réussies et les quelques effets visuels qui accompagnent les parties finissent de nous séduire. Seul bémol, l’interface peut paraître intimidante au début, surtout pour la partie création de decks.
Mythgard pioche plein d’idées à droite à gauche pour nous servir une expérience riche, offrant des styles de decks variés, avec en prime un système de mana bien pensé. Finalement le gameplay se révèle assez simple à comprendre mais fourmille de subtilités.
Le titre profite d’une belle bande-son qui nous accompagne agréablement durant nos parties. les doublages sont convaincants dans l’ensemble, mais certains mériteraient encore quelques ajustements.
Vous aurez un bon paquet de modes de jeu à vous mettre sous la dent (1v1, 2v2, tournoi, puzzle, etc.) et le jeu vous occupera un bon moment si vous souhaiter explorer les différents styles de decks. Il vous faudra aussi beaucoup de temps pour obtenir toutes les cartes, à moins de passer à la caisse bien sûr.
Même s’il ne révolutionne pas le genre, Mythgard souffle un vent d’air frais sur le monde des jeux de cartes à collectionner. Avec son gameplay très solide et ses nombreuses possibilités de deck building le titre de Rhino Games a de quoi vous scotcher devant votre écran pour un bon moment. Le folklore entourant son univers mériterait quand même d’être mieux mis en avant pour nous faire profiter de ce patchworks improbable. Mythgard incorpore aussi bien des divinités déchues, des zombies, ou des robots géants, que des vampires, des valkyries et des yakuzas. Certains pourront reprocher à cet univers de n’être qu’un vaste gloubi-boulga, quand d’autres apprécieront les nombreux clins d’œil disséminés à droite à gauche. Dans tous les cas on ne peut que louer son gameplay très accessible, mais recelant de nombreuses subtilités quand on prend le temps de creuser l’ensemble des mécaniques de jeu.