Dans l’univers des jeux vidéo indépendants, Harold ne fait pas partie des titres complètement barrés ou aux concepts innovants. Il ne fait que s’approprier des mécaniques de jeux connus de tous. Il n’empêche : le premier jeu de Moon Spider Studio remplit ses objectifs avec brio.
Comme le titre du jeu oublie de vous le préciser, vous n’incarnez pas Harold. Mais vous vous retrouvez dans la peau d’un aspirant ange gardien. Premier de votre promotion, tout vous réussi, et votre accès à l’école des archanges semble si évident que vous en devenez prétentieux. Au dernier stade de votre formation, alors qu’il vous revient de rendre soin d’un athlète à l’issue d’une série de courses à pied, vos instructeurs - dans leur grande sagesse -, ont décidé de vous donner une leçon afin de vous inculquer l’humilité. A vous de guider Harold, un concurrent qui n’a rien pour lui. Ni spécialement rapide, ni spécialement intelligent, il va vous falloir faire preuve de toute votre adresse pour mener le jeune homme à la victoire. « J’ai imaginé le Game Concept de Harold il y a plus de 6 ans, bien avant de fonder Moon Spider Studio. En tant que gros fan de Platformer, je cherchais une nouvelle façon d’y jouer. C’est de là qu’est venue l’idée de départ pour Harold ! En faisant un simple twist des règles traditionnelles que l’on trouve dans les Plateformers où le joueur contrôle un personnage qu’il doit faire naviguer dans un environnement hostile. Dans Harold, le personnage se déplace tout seul, alors que le joueur, lui, contrôle l’environnement. Il s’agit tout simplement d’un platformer ou le gameplay a été inversé ! » confie Loris Malek, fondateur de Moon Spider Studio et Game Directeur sur Harold. Une idée simple, mais qui change tout, ou presque. Ne pas contrôler le personnage implique que vous devez coordonner vos actions aux siennes et non l’inverse, comme c’est habituellement le cas. Votre timing doit donc être ajusté au mieux. Trop tard, et le pauvre Harold risque de perdre énormément de temps et ne pas passer l’obstacle. A l’inverse, si vous agissez trop tôt, ce sont vos adversaires qui bénéficient de vos actions.
Intervention divine
Comme le précise plus haut Loris Malek, vous ne pouvez interagir qu’avec le décor. Couper les cordes, rabattre les plateformes, casser les barrières ou énerver les crocodiles pour assurer à Harold le plus court chemin vers l’arrivée et à ses adversaires les pires embuches. Vous avez tout de même la possibilité de pousser Harold à accélérer sur une courte distance. Une action dont l’utilisation est limitée, mais non sans conséquence. En effet, recourir à ce pouvoir vous coûte un éclair, tout comme une chute d’ailleurs. Et si, par malheur, vous venez à perdre votre dernier éclair, cela signifie la fin de la course pour le pauvre garçon. Rassurez-vous, vous pouvez regagner vos éclairs lors des courses en ramassant sur la piste des auréoles. Pour deux auréoles acquises, vous bénéficiez d’un éclair supplémentaire (dans la limite de cinq). Cela semble faciliter la tâche du joueur, mais il n’en est rien, car le jeu ne pardonne aucune erreur. Vous n’avez donc nul autre choix que de réfléchir et réagir rapidement. Parfois, il est bien plus efficace de prendre le chemin le plus long et de ne rater aucun obstacle, plutôt que d’emprunter le chemin le plus court, et de trébucher à chaque difficulté. « C’est une question très difficile… car pour moi, j’ai l’impression que Harold est un concentré de tout ce que j’ai aimé dans les jeux vidéo depuis 30 ans ! Pour le Gameplay, c’est vraiment un florilège de pas mal de jeux qui ont marqué ma vie de joueur. Il y a évidemment du Mario, Sonic, Pitfall et même du Lemmings, mais il y a aussi d’autres inspirations moins évidentes comme Mario kart, WipeOut ou encore Guitare Hero. » poursuit Loris Malek.
La beauté du sport
Si Harold n’invente rien, il bénéficie d’un univers qui lui est propre, aussi bien d’un point de vue visuel que sonore. Et Loris Malek d’expliquer : « Pour la direction artistique, on s’est inspiré des vieux films ou séries d’animation traditionnelle 2D, de Disney évidemment en passant par Chuck Jones, sans oublier Miyazaki dont toute l’équipe est extrêmement fan.». Des inspirations qui ont également été décisives dans le choix de baser le studio aux Etats-Unis : « Pour Harold, nous avions besoin d’un très haut niveau de qualité pour les animations ingame d’un côté, mais aussi pour les cinématiques. Il était donc impératif de travailler avec des animateurs qui avaient une grande expérience dans l’animation traditionnelle 2D que l’on trouve dans les cartoons old school. il était donc logique pour moi de monter Moon Spider Studio aux USA, afin de pouvoir embaucher cette catégorie très précise d’animateurs venant de grands Studios comme Disney, WarnerBros, etc. » Le résultat est vraiment saisissant. Le jeu est joli, coloré et bénéficie d’animations fluides. Quant à la musique d’Harold, elle insuffle une ambiance unique. Elle a été composée par Olivier Deriviere à qui l’on doit déjà les musiques de « Remember Me » ou de « Assassin’s creed Black flag ». Une collaboration sur laquelle revient Loris Malek : « Le travail qu’a fourni Olivier sur Harold est à mon sens prodigieux ! J’ai toujours eu une très grande confiance en Olivier que ce soit au niveau de ces compositions, mais aussi, et surtout sur la façon d’implémenter ses compositions dans le jeu. Pour Harold, il a eu carte blanche pour créer ce qu’il pensait être le mieux. Mais bon, je pense que mon jugement sur Olivier et son travail est un peu biaisé, car il est, avant tout, un ami très proche depuis 15 ans ». Voilà qui a le mérite de la franchise.
Réalisé dans une 2D impeccable, les influences liées à l’animation traditionnelle sont immédiatement perceptibles. Avec des décors colorés, des personnages dignes des séries animés de notre enfance, le jeu nous donne véritablement l’impression de contrôler le déroulement d’un épisode des fous du volant, mais version course à pied. Une qualité qui devrait faire réfléchir certains studios d’animation dont c’est le fond de commerce.
Intuitifs et simples, les contrôles du jeu ne sont pas un obstacle. Le jeu n’en est pas moins très exigeant et ne laisse passer aucune erreur. Ce qui risque de faire abandonner les joueurs les moins revanchards. La courbe de progression ressemble énormément à celle d’un jeu de rythme. Le nombre important d’itinéraires dans chaque niveau l’éloigne des classiques « Try and Die ». Les meilleurs joueurs en quête de challenges pourront poursuivre la compétition en tentant de faire un meilleur chrono que leurs amis sur chacun des tracés du jeu.
Le travail d’Olivier Deriviere est tout bonnement excellent. Le gospel s’accorde parfaitement au jeu et à son ambiance. Pour ce qui est des bruitages, sans être spécialement remarquables, ils ont le bon goût de ne jamais devenir agaçants.
Si le jeu peut paraitre répétitif à certains, faute au genre dont il fait partie, le jeu dispose d’une excellente durée de vie pour qui veut arriver au bout des épreuves qu’il propose. Pour les amateurs de compétitions et les runners, le jeu offrira une rejouabilité quasi illimitée.
Harold est une véritable réussite, aussi bien du point de vue technique que dans son gameplay. Immédiatement fun avec des contrôles intuitifs, il n’en reste pas moins un véritable challenge que seuls les plus acharnés réussiront à mener à 100 %. Avec son univers coloré et sa bande-son d’excellence, le jeu de Moon Spider Studio a su s’approprier un genre extrêmement codifié pour en faire quelque chose de nouveau.